Rémunération des stagiaires

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Mercredi 6 février 2008

Rémunération des stagiaires: le gouvernement propose 380 euros à partir du quatrième mois


Le ministre du travail a présenté un projet de décret imposant une rémunération minimale, mais seulement à partir du quatrième mois. Une proposition très en retrait des demandes du collectif Génération Précaire
Le ministre du Travail, Xavier Bertrand, a présenté mercredi un projet de décret qui fixerait la gratification des stages étudiants en entreprise à 380 euros mensuels, mais seulement à partir du quatrième mois de stage. "Lorsqu'un stage en entreprise (...) excède une durée de trois mois consécutifs au sein de la même entreprise, la gratification est due au stagiaire à compter du premier jour du quatrième mois de stage (...)", précise le texte présenté lors d'une réunion du Comité des stages, présidée par M. Bertrand et sa collègue à l'Enseignement supérieur, Valérie Pécresse.

"Le montant de la gratification due au stagiaire est fixé à 12,5% du plafond horaire de la sécurité sociale", ajoute le projet de décret, une note précisant que cela équivaut à 379,18 euros ou 29,6% du Smic. L'entreprise ne paye pas de cotisations sociales sur ce montant, en vertu d'un décret pris l'an dernier.

Le texte soumis par M. Bertrand est très en retrait par rapport aux revendications du collectif Génération Précaire, qui réclame depuis deux ans un statut et une rétribution pour les stagiaires. Ce collectif, soutenu par plusieurs syndicats de salariés (Ugict-CGT, FO-cadres, etc), souhaite aller vers un minimum de 50% du Smic, payable dès le premier mois de stage et avec une progression en fonction du niveau d'études.

Génération Précaire a déjà mis en garde sur le risque d'un contournement du décret avec la prolifération de stages d'une durée d'un, deux ou presque trois mois non assujettis au paiement de la gratification. Le texte de M. Bertrand précise que l'entreprise est tenue "d'établir et de tenir à jour la liste des conventions de stage qu'elle a conclues". Génération Précaire a toujours jugé "plus simple et plus efficace pour lutter contre les abus" d'intégrer les stagiaires dans le Registre unique du personnel.

Lors de la dernière réunion du comité, le patronat s'était montré très prudent sur la gratification, les représentants des PME soulignant n'avoir pas toujours les moyens de payer les stagiaires et menaçant de ne plus pouvoir en accueillir.

(source AFP)

http://www.lesechos.fr/info/france/300211439.htm


Je ne vais pas vous cacher qu'il y a eu une réaction dans mon cerveau à partir du moment où j'ai entendu cette information pour la première fois à la télévision la semaine dernière.

Je suis mitigée entre deux réactions et sentiments face à ce projet.

D'un côté, je suis heureuse de voir que le gouvernement se bouge enfin, qu'ils pensent à "nous", les jeunes (et moins jeunes). Surtout que ça fait 2 ans que le collectif Génération Précaire dénonce et réclame un statut et une rétribution pour les stagiaires.

D'un autre je suis outrée et aberrée de ces longues années d'attente pour que quelqu'un nous entende enfin!


Pour vous expliquer un peu mon point de vue, je voudrais revenir sur ma propre expérience (qui reste un cas à part car je pense que je n'aurais jamais droit à cette "nouvelle loi").
Comme la plupart le sait, je suis en alternance dans le monde animalier. J'effectue un stage dans une animalerie sur Paris depuis septembre 2006.
Depuis septembre 2006, je n'ai donc jamais été payée.
Et pourtant... je suis sur mon lieu de stage 35h par semaine, je fais le même boulot qu'un vendeur si ce n'est plus, je suis parfois toute seule à fermer le soir, je remplace des vendeurs absents, je fais des heures supplémentaires, je rentre chez moi à 22h30 le soir et j'apporte un bon chiffre d'affaires au magasin lorsque je fais mes ventes et que j'apporte mes connaissances aux clients.
Bien sur, vous me direz que j'étais au courant lorsque je me suis engagée là dedans. Mais je n'avais pas le choix!
De nos jours, rares sont les patrons d'entreprises voulant rémunerer un stagiaire (because charges, et puis pourquoi débourser de l'argent lorsqu'on peut avoir de la main d'oeuvre gratuite?) et c'était soit ça, ou bien je ne pouvais acceder à la formation de mon dliplôme.
Et encore...
La formation... depuis que je suis là bas, mon maitre de stage ne m'a pas aidé une seule fois dans les tâches de productivité que je devais réaliser, j'ai du me débrouiller toute seule en plus des tâches supplémentaires qu'on me demande de réaliser (et que je ne suis pas censée faire...).

Le problème étant que les entreprises et mon école s'arrangent pour trancher les semaines de stages avec les semaines de cours, afin de nous empêcher d'acceder à ces rémunérations. (15 jours de stages, 15 jours de cours, et ainsi de suite...).
Mais au total, j'ai bien 30 semaines de stages réalisée jusqu'à ce jour, et il m'en reste encore 8 à faire dans cette entreprise.
38 semaines de stage.
10 mois et demi tranchés.
Et un salaire de ZERO €
Même pas un tiquet resto pour pouvoir manger le midi...

Imaginez-vous, vous lever le matin pour vous dire que vous allez bosser 8 heures dans la journée, 35 heures dans la semaines, 1330 heures d'escalvagisme durant toute la période de votre formation, tout celà pour RIEN! (et qu'on m'épargne le blabla sur l'experience professionnelle acquise pour essayer de compenser le manque de rémunération et de considération pour le stagiaire...)

Aujourd'hui je suis fatiguée, je suis dégoutée de "travailler", de me faire exploiter...
Et voilà qu'il y a peu j'apprends que "la depression du stagiaire" est un phénomène plus que courant dans le monde du travail... ce monde où pour le moment je n'ai aucun statut reconnu par l'état, le gouvernement, et même par mon propre maître de stage, ou qui que vous souhaitez d'autre...
Ce monde où je suis un peu une "sans papiers" donc...


"Tout travail mérite salaire"
Je me demande si ce vieux dicton est encore valable et réalisable de nos jours.
Oui, on peut vraiment parler d'une jeunesse précaire.
Et j'en fais partie, malheureusement...

Le problème réel est que le stage a été détourné de son objectif initial.


Normalement le stage est la continuation logique des études, et le patron une sorte de prof aidant le nouvel entrant dans la vie active à mettre en pratique ce qu'il a appris en théorie.
On est pas payé pour aller à l'école, donc il n'y avait rien de choquant à ne pas payer un stagiaire.

Ma tante qui était pharmacienne et qui a eu des stagiaires dans les années 70 m'a dis que la question du paiement ne se posait même pas. D'ailleurs il aurait fallut les payer, qu'elle n'en aurait pas pris vu qu'elle passait plus de temps à expliquer au stagiaire ce qu'il fallait faire qu'autre chose.

Mais ce système ne peut marcher que dans un environnement de plein emploi.


Actuellement le stagiaire est surtout un intérimaire payé au rabais voire gratis.
Et certains milieu sont des champions dans l'abusement des stagiaires (qui a dit le milieu culturel, audiovisuel, etc. ?).
Avec tous les abus que cela entraine.


On en vient donc à faire une loi obligeant à payer les stagiaires.
Même si cela me semble nécessaire vu la dérive, cela est symptomatique d'un changement de société.

Ici les stages ont lieu dans la formation pour les niveaux bac+3, c'est un mois par an maximum. Des travaux de plus longue haleine se transforment parfois en travail de fin d'étude. C'est formateur et donc ça reste gratuit évidemment.

Je suis "Maître de stage" dans mon domaine et l'accueil du stagiaire me demande beaucoup de temps (et de corrections : des fois ça fait peur de savoir que la personne sera diplomée dans quelques mois et qu'elle commet des bourdes pareilles, que je ne vois parfois qu'après avoir rempli son évaluation de stage... pke pendant ce temps-là je suis toujours à temps partiel et je dois continuer à faire tourner la boutique en plus d'explicationner les joies et ficelles du métier aux étudiants).

Depuis que je suis abonnée aux listes françaises de discussion professionnelle sur le net, je vois passer les offres de stage dont la description des tâches correspond plus à un CDD avec au mieux à la clef 30% du smic + tickets repas + une moitié de carte orange. Et ça me fait d'autant plus bondir que les entreprises qui cherchent en profitent pour faire de la pub dans le message en y étalant des CA effarants !!! La plupart du temps, ils réclament des gens hyperqualifiés et AUTONOMES, ce qui nous éloigne des stagiaires de la tantine à Marlénus à qui il fallait tout explicationner.

Il y a quelques années, dans une période creuse, je me suis amusée à répondre à ces personnes en leur expliquant que le CDD et l'intérim existaient et que je n'apréciais pas que l'on dévalue ma profession de la sorte : j'ai reçu des injures en réponse !!!

De temps en temps, un membre de la liste s'indigne... sans trouver trop d'écho.

c'est une loi qui est forcément insuffisante
car comme le dit Marlenus, la notion de stage est pervertie
comme le dit Movida, c'est du CDD gratuit

en lettres, c'est vraiment ubuesque.
SMM a travaillé dans une grande maison d'édition (F*y*** pour ne pas la nommer) : 2 DEA, 3 mois de stage puor 280 euros par moisL
Elle remplaçait un congé maternité.
Aucune formation, aucune possibilité d'embauche : de l'exploitation mais ça fait de l'expérience parait-il.

Domaines de l'édition, des expos et tout ça fonctionne beaucoup comme ça.
D'une côté, on se veut une sorte d'intelligentsia, si possible de gauche, ç'est mieux pour l'image
de l'autre, on profite de tout pour faire le plus de profit.

comme Arthus-Bertrand qui cherchait pour son expo dans le 6ème des chargés d'expo BAC + 6 sans les rémunérer
comme Fayard qui ose publier le guide " Stagiaires, génération précaires"